Pour commencer, pouvez-vous vous présenter ainsi que la structure au sein de laquelle vous intervenez ?
Kinésithérapeute de formation, j’ai exercé en libéral pendant plusieurs années, en accompagnant plus particulièrement des patients atteints de troubles neurologiques. Depuis 2019, j’interviens au sein du Centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelles L’ESPOIR en tant que kinésithérapeute et dans la cellule Recherche-Innovation-Développement. Veille technologique, tests, projets de recherche… Notre équipe mène une réflexion transversale sur l’évolution des pratiques pour aider au mieux les patients et les professionnels qui les accompagnent.
Vous avez eu l’occasion d’utiliser le Wheeleo®. Pouvez-vous nous en expliquer le principe ?
Effectivement, j’ai acheté un Wheeleo® en 2019 et j’ai pu l’utiliser dans le cadre de mon cabinet. Le principe est assez simple : il s’agit d’un compagnon d’aide à la marche de nouvelle génération. L’intérêt principal est que le patient peut se déplacer sans avoir à soulever ce qu’on pourrait aussi appeler un« déambulateur-canne ». A la clé, il y a un net gain en fluidité, avec une plus grande facilité à respecter les temps nécessaires ainsi que la libération d’une main pour éventuellement transporter de petits objets.
De votre expérience, à quels besoins peut répondre le Wheeleo® ?
Le Wheeleo®, comme toute aide technique, ne répond pas aux besoins de tous les patients. Les patients avec des troubles attentionnels ou cognitifs trop importants ne sont souvent pas en capacité de l’utiliser. Mais, c’est une solution pertinente pour améliorer les capacités de déplacement d’un certain nombre de profils et ce, dès le début d’une prise en charge. Car le fait est qu’une fois qu’un patient a pris des habitudes, il lui est difficile d’en changer. Pour être mis en confiance, il pourra ainsi être intéressant de s’entraîner dès le départ avec un Wheeleo®.
Pour quels profils cette solution est la plus pertinente ?
Le choix se fait nécessairement au cas par cas, en fonction de la pathologie du patient, mais aussi de ses besoins et de son ressenti personnel. Par exemple, ce peut être quelqu’un qui a des difficultés à marcher suite à un AVC, qui connaît des troubles d’équilibre en raison d’une mauvaise maîtrise d’un membre inférieur ou d’une perte de sensibilité du pied. J’ai eu un patient correspondant à ce profil quia nettement gagné en fluidité en utilisant ce déambulateur-canne. Idem pour une patiente atteinte de la maladie de Parkinson et présentant des troubles posturaux avec un syndrome de Pise – posture inclinée d’un côté. Avec le Wheeleo®, elle a pu se déplacer de manière autonome dans son appartement avec la capacité de saisir de petits objets, ce qui n’était pas le cas avec un rollator 2 roues.
En fait, peu importe la pathologie, sont avant tout concernées les personnes qui souffrent d’une paralysie ou une parésie d’un côté du corps, en raison notamment de troubles neurologiques. Je ne vous parle évidement que des patients que j’ai l’occasion de rééduquer. Canne, rollator, Wheeleo®… Pour faire son choix, il faut évaluer en amont les troubles exécutifs et attentionnels des patients, les prises de risque, leur capacité à évoluer en autonomie. Et je précise que je n’ai pas encore eu l’occasion de tester deux cannes, une de chaque côté, pour vérifier si cette formule pouvait s’avérer pertinente pour certains patients.
Quelles sont les différences à l’usage avec une canne ou un rollator ?
Un patient présentant des troubles unilatéraux disposant d’une simple canne avec un patin aura une marche moins « rapide » qu’avec le Wheeleo® ainsi qu’une endurance moindre – la canne lui demande davantage d’efforts et de concentration. De même, il offre une plus grande fluidité de la marche que la canne tripode ou quadripode.
Qu’en est-il de la prise en main du Wheeleo® par le patient ?
En fonction des troubles cognitifs associés, un temps d’adaptation d’au moins une ou deux séances est nécessaire. Si un patient présente des difficultés pour soulever son pied par exemple, il faut soit compenser avec une orthèse qui va le maintenir, soit l’aider à se focaliser dessus pour qu’il trouve le bon rythme. Par exemple, un patient qui a fait un AVC quelques semaines plus tôt aura des difficultés à mettre du poids sur sa jambe. Le professionnel devra le préparer, se tenir en appui, pour qu’il ose appuyer sa jambe, et de préférence dans les meilleurs délais pour favoriser la récupération.
La présence de roues fait craindre a priori à certains que le Wheeleo® génère des pertes d’équilibre
Le Wheeleo® me semble très stable. Il peut parfois s’éloigner un peu, mais je ne l’ai personnellement jamais vu basculer. L’important est que le patient assimile qu’il doit le garder bien à côté de lui. Le principal point d’attention porte surtout sur le côté parétique du corps : comme la marche est plus « rapide »,plus fluide, il faut veiller à ce que l’autre jambe suive. Le professionnel devra faire attention à être bien situé par rapport au patient pour éviter ce risque dans les premiers temps. Mais rien n’empêche d’avancer doucement pour prendre ses marques.
L’important est, je pense, d’essayer cette nouvelle aide technique. Il ne faut pas mettre de côté une solution qui pourrait s’avérer bénéfique pour un certain nombre de patients. D’autant plus que, contrairement à ce que l’on pourrait croire, le risque ne paraît pas plus important qu’avec une autre canne. C’est une offre complémentaire intéressante par rapport à la gamme classique canne ou rollator.